N’essuie jamais de larmes sans gants de Jonas Gardell – Les débuts du SIDA

Ma collègue libraire a lu ce livre à sa sortie, en a fait un court mais convaincant billet. Puis elle m’a dit: Je ne sais pas si c’est pour toi par contre, parce que c’est vraiment dur émotionnellement ! J’ai dit « Oui, oui » et une fois en vacances j’ai embarqué Daddy chez Cultura et il me l’a acheté (Daddy c’est le meilleur, vous le verrez dans un prochain article fantasy – Ouuuh ça tease !).

« Tant que des milliers de pédés seront persécutés, harcelés, emprisonnés, assassinés à cause de leur amour, l’homosexualité ne sera pas une question de vie privée. »

Déjà, dès que tu auras compris le sens du titre, si tu as un minimum d’empathie, je ne donne pas cher de ton paquet de Kleenex. Je te raconte un peu l’histoire, enfin le début quoi.

Rasmus vit au fin fond du fond de la Suède, habitué aux insultes homophobes, il décide arrivé à la majorité de partir vivre à Stockholm et d’assumer et d’enfin vivre librement son homosexualité. Benjamin, lui, est issu d’une famille Témoin de Jéhovah. L’homosexualité y est tabou, interdite, et Benjamin découvre et apprivoise la sienne comme par un hasard du destin. Ces deux jeunes hommes vont se rencontrer via un groupe d’amis également homosexuels, et s’aimer, dans les années 80 où la peste du XXème siècle, le Sida fait ses ravages en Suède. Pas besoin de te le dire, mais je le fais quand même pour protéger ton petit cœur sensible: la maladie va frapper dans le groupe d’ami et à cette époque…on en mourrait assez rapidement et dans des souffrances atroces.

Jonas Gardell est homosexuel, et je pense que ce roman est, au moins en partie, biographique voire autobiographique. Il s’est également extrêmement bien documenté afin de nous sortir des archives de vrais articles de journaux de l’époque, de vrais textes de lois… L’auteur nous livre donc la vérité; via témoignage subjectif et via les sources historiques. Je le répète, tu as dans les mains de l’histoire vive, et crois-moi, si c’est absolument passionnant et instructif c’est également à gerber. Oui, parce que, si comme moi avant ma lecture tu ne connais l’histoire du Sida qu’en gros, là tu vas apprendre comment les malades étaient traités à l’hôpital, par leurs proches, par la société. Tu vas voir ce que les journalistes, les gens et les lois disaient des homosexuels. Bien sûr, le contexte nous explique aussi que les soignants ne savaient rien de la maladie, de son mode de propagation, des soins….rien. Et tout le monde avait peur pour soi et les siens. Donc je ne me permettrai pas de condamner les protocoles médicaux ou les réactions des gens apeurés, justement à cause de cette ignorance et de cette peur, mais ils n’en étaient pas moins atroces.

« Raconter est une sorte de devoir.
Une manière d’honorer, de pleurer, de se souvenir.
Une manière de mener la lutte de la mémoire contre l’oubli. »

Là où Jonas Gardell est fort, c’est qu’il te tord le ventre, il te poignarde le cœur et te donne envie de vomir sur cette époque MAIS en même temps, ce petit groupe d’amis dont il te parle…ils vont entrer dans ton cœur et te faire sourire. Ils ont des défauts et des failles, bien sûr, puisqu’ils sont humains (ce qu’on faisait oublier aux gens qu’on effrayait à l’époque). Mais ces jeunes hommes ne sont qu’amour et vie; ils veulent profiter, s’amuser, être libres, aimer et être aimer, être libres. Ils ne font de mal à personne, n’agressent personne et ne reçoivent en retour que haine, dégoût, abandon et peur. Heureusement, ils sont forts ensemble et ne lâcheront jamais un des leurs, ce qui n’empêchera pas la maladie d’en cueillir.

Quotidien des campagnards suédois, des citadins suédois, des homosexuels suédois, tu vas tout voir. Tu seras ému, scandalisé, révolté, incrédule, charmé et brisé après ce livre. Mais vraiment…il faut le lire ! Non seulement pour savoir mais aussi pour ressentir. Je sens bien que j’insiste lourdement mais voilà pourquoi:


« Je veux dans ma vie pouvoir aimer quelqu’un qui m’aime. »

A notre époque, certains pensent qu’il n’y a plus d’homophobie. Faux. Et pire, certains pensent toujours que l’homosexualité est contre nature. Spoiler Alert: si ça existe à l’état naturel, ça ne peut pas être contre-nature. Ce livre pourrait aider certains à comprendre qu’une personne homosexuelle….est une personne, c’est tout. Qu’elle n’ait pas les mêmes goûts amoureux/sexuels que toi ne devrait pas lui valoir toutes ces souffrances. Si la religion est entre toi et dieu, les choses de l’amour devraient pouvoir être entre toi et tes partenaires; les autres n’ont rien à y dire.

Bisous, Bestiole

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