La nuit des béguines d’Aline Kiner, la fin d’un monde

Qu’est-ce qu’une béguine ? Une femme qui, souvent veuve ou célibataire, peut s’instruire, échappe à la domination masculine en se retirant dans une communauté au sein d’une grande ville. Leur mode de vie est mi-religieux mi-laïc: elles évoluent sous une règle monastique, mais vivent leur religion librement, sans prononcer de vœux. Apparu au XIIe siècle, leur mode de vie sans règles précises et leur liberté paraissent suspects aux hommes d’église. Persécutées à partir du XIIIe siècle, elles sont condamnées en 1311 pour « fausse piété et hérésie ». En 200 ans, les béguines disparaissent presque totalement de l’Europe, même si le béguinage persiste en Flandre jusqu’au XIXe siècle et que la dernière béguine serait décédée en 2013. Le titre de ce roman, La nuit des béguines, traite justement de cette époque charnière où les persécutions se sont muées en condamnation (le roman se passe en 1310) et que les béguines ont commencé à s’éteindre.

« Quelle que soit la petitesse de chacune de nos vies, elles relèvent toutes d’un vaste ensemble, les mouvements et les troubles de l’âme dépendent de ceux du monde, la violence ne s’arrête pas à ceux qu’elle vise, elle rebondit comme un caillou sur l’eau dure et frappe, frappe encore, les peurs collectives s’amplifient des bassesses individuelles, les grandes ambitions se conjuguent aux plus médiocres.


Pourquoi ai-je dû attendre mes 28 ans pour apprendre l’existence des béguinages ? Tu te rends compte ??
Les non-spécialistes te décriront souvent le moyen âge comme une période sale et obscure et surtout pas comme une époque où les femmes, même peu nombreuses, ont eu des libertés ou le droit de prendre leur vie en main. Sans doute parce que c’est ce qu’on en comprend étant petit quand on nous parle de cette époque…et qu’on ne cherche pas tellement plus loin: patriarcat, guerres de territoire, châteaux froids, féodalité.


Tu dois savoir que, sans être spécialiste (du tout), j’adore le moyen-âge. Cette époque m’intrigue et m’intéresse beaucoup et je lis régulièrement des romans qui y prennent place. Alors t’imagines bien qu’apprendre leur existence m’a donné l’envie d’en savoir encore plus à la fois sur les béguines et sur le moyen âge en général.
J’ai vraiment apprécié que le roman s’appuie sur des personnages, dates et événements réels. Je pense notamment au manuscrit de Marguerite Porete ou au contexte historique en général (politique et religieux).


Je te dirais d’ailleurs que j’ai lu ce roman comme une tranche d’Histoire plus qu’en tant que roman à part entière. Pas dans le sens où l’Histoire n’est pas romancée, bien sûr, mais tout simplement parce qu’on a beau suivre les mêmes personnages tout le long du roman, on les suit comme de loin. On prend leur histoire en cours de route, il y a beaucoup d’ellipses temporelles et lorsque le livre se termine, leur histoire n’est pas vraiment terminée (à mon sens). Les ellipses temporelles m’empêchaient parfois, sinon de comprendre l’intrigue, de m’intéresser aux personnages.


Car l’intrigue de ce roman ne tient pas tant aux personnages que l’on suit qu’à l’Histoire, au contexte, même si je me suis un peu attachée à certains d’entre eux. Le vrai exercice d’Aline Kiner n’est pas le roman mais bien le béguinage, le moyen-âge, l’histoire des femmes.
En résumé, même si j’ai adoré sentir les odeurs de Paris et du jardin d’Ysabel, j’ai vraiment préféré le cours d’histoire, très accessible et immersif. Et si tu as des romans (ou non fictions pour débutant) à me conseiller qui te racontent l’Histoire de manière fidèle mais fluide et passionnante, comme seul un bon prof d’histoire sait le faire, alors vas-y, balance les noms, je suis prête !

Bisous, Bestiole

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